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Cinéma Moderne: Le phoenix du grand écran

Cinéma Moderne: Le phoenix du grand écran

On ne s’inventera pas d’histoires, une salle de cinéma n’est pas le type d’entreprise le plus rentable qu’on puisse ouvrir en 2019. Et c’est pourtant dans cette aventure périlleuse que les cinéphiles Roxanne Sayegh et Alexandre Domingue ont foncé en septembre dernier, en ouvrant leur charmant petit Cinéma Moderne.

L’affaire était risquée. Alors que partout dans la province, les salles de cinéma se vident au profit de l’abonnement Netflix, les fondateurs de Cinéma Moderne croient mordicus en l’importance de pouvoir savourer les primeurs et les classiques du septième art dans la pénombre et la convivialité d’une salle de projection.

Le public a été au rendez-vous. «Nous avons aujourd’hui un taux d’occupation de 70%, soit 37 personnes par séance, ce qui est près du double de ce que nous avions prévu. Notre salle n’a que 54 places, ça se remplit vite, certes, mais sachant que le taux d’occupation moyen au Québec tourne autour de 10%, il y a de quoi être content», lance Roxanne Sayegh.

Avec l’ambition débordante et le maigre budget qui caractérise bien l’entrepreneuriat culturel, il n’y avait pas de place à l’erreur. «Nous n’étions que deux personnes pour tout faire les premières semaines quand le cinéma a ouvert. C’était un rythme de fou. Après un mois, on était au bout du rouleau. Heureusement, les bons résultats du projet nous ont permis de faire des embauches plus tard», raconte la fondatrice.

Roxanne Sayegh et Alexandre Domingue ont aussi misé sur leur expertise dans le domaine du cinéma pour mener la salle à bon port; elle ayant oeuvré dans les festivals et la distribution de films indépendants, et lui; dans l’audiovisuel.

Cinéma Moderne se démarque sur la carte du cinéma montréalais par son modèle de programmation. «Nous ressemblons plus à un festival de films qu’à une salle commerciale traditionnelle par le type de films qu’on présente et les activités qu’on organise, précise la fondatrice. Un film est typiquement présenté une dizaine de fois sur plusieurs semaines.»

Selon elle, le fait qu’un long-métrage soit disponible en ligne n’affecte pas nécessairement les ventes de billets. «Nous arrivons à remplir facilement nos séances, par exemple le documentaire Ryuichi Sakamoto: CODA qui était sur la plateforme MUBI en septembre et qu’on présente depuis plusieurs mois en remplissant pratiquement chaque séance».

Même constat pour le film Roma qui fait salle comble même si ce dernier-né d’Alfonso Cuaron salué par la critique est distribué sur Netflix. «Nous avons déjà plus de 100 séances à guichet fermé, même si le film se trouve en ligne depuis la mi-décembre. Plus de 5000 personnes ont choisi de voir le film au Cinéma Moderne sur grand écran, ce qui démontre la pertinence des salles de cinéma.»

La proximité avec les cinéphiles facilite la tâche des petites salles de cinéma, selon l’entrepreneure. «Étant une petite salle, nous avons la chance de pouvoir avoir un contact assez direct avec notre clientèle ce qui nous permet d’avoir des retours rapides par rapport à ce qu’on présente.»

Cinéma Moderne emploie présentement 4 personnes-orchestre qui savent jouer plusieurs rôles dans l’écosystème de la salle, dont un café qui offre nourriture et boissons avant, pendant et après les séances. Avec l’ouverture de la salle de cinéma du Musée des Beaux-Arts de Montréal, tout porte à croire que l’entreprise devra se soucier de cette concurrence, plutôt que de sa survie dans les mois à venir.

L’exemple du Cinéma Moderne injecte une dose d’espoir dans la communauté indéfectible de cinéphiles québécois qui fréquentent encore les salles de cinéma. Le visionnement en salle renaîtra-t-il de ses cendres? Peut-être, mais il reste encore beaucoup de travail à faire à tous les paliers de l’écosystème selon l’entrepreneure: «Il faut certainement repenser nos façons de faire, tant les distributeurs, que les exploitants de salle et les festivals, et prendre en considération les attentes du public.»

Cinéma Moderne

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