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« On ne peut pas générer le talent. » – Eric Harvey, fondateur d’Ambiances Ambigu[ë]s

« On ne peut pas générer le talent. » – Eric Harvey, fondateur d’Ambiances Ambigu[ë]s

Vous en avez peut-être déjà entendu parler: Ambiances Ambigu[ë]s. Une entreprise qui offre des services de gérance, promotion, production, booking de spectacles et maintenant de label (Duprince, lancé en septembre dernier), et qui a réussi à se faire un nom très intéressant dans le paysage musical québécois. Ambiances Ambigu[ë]s, c’est qui? C’est quoi? C’est l’idée d’Eric Harvey, un passionné qui a su saisir les bonnes opportunités au bon moment. Entrevue.

« J’ai fondé Ambiances Ambigu[ë]sen 2003. Au départ, l’entreprise a été créée pour la production de la Ligue d’Improvisation Musicale de Montréal (LIMM), projet qui a connu pas mal de succès au Café Campus pendant 12 ans. C’est en 2007 que j’ai décidé de me servir de la structure existante pour démarrer la production de spectacles et gérance d’autres artistes. Frédéric Poulin s’est associé à moi en 2010 et aujourd’hui, on compte 9 personnes dans notre rocambolesque équipe. »

Même si Eric est en charge de la production des concerts et de la gérance d’une portion des artistes d’Ambiances Ambigu[ë]s, ou encore, qu’il en a beaucoup dans sa cour, il garde les deux pieds bien sur terre: « Je fais également le café le matin et suis souvent celui qui réalise qu’il y a trop de vaisselle sale et qui fait un tirage pour trouver qui s’en chargera. »Et bien sûr, il peut compter sur l’aide précieuse de son collaborateur: « Fred couvre l’autre portion des artistes en gérance et veille aux sorties d’albums et promotion médias. »

La musique avant tout

Au fil des années, des artistes de grand talent – et qui attirent de plus en plus l’attention – ont eu envie de collaborer avec Ambiances Ambigu[ë]s: Keith Kouna, Rosie Valland, Gazoline, Antoine Corriveau, Benoit Paradis Trio, Chantal Archambault, Les Petites Tounes, Saratoga, Toast Dawg, Vilain Pingouin et Anique Granger. Solide, vous pensez ? Effectivement, et ce n’est pas un hasard. Avant de travailler avec un musicien, Eric y pense deux fois plutôt qu’une: « Il faut avant tout que j’aime ce qu’il fait, que j’ai envie d’en écouter constamment et de le voir en spectacle. Ensuite, c’est une question de chimie avec la/les personne(s). Nous travaillons sur plusieurs niveaux avec les projets que nous représentons et nous avons toujours une vision de long terme. Beaucoup des artistes qui sont chez nous le sont depuis le tout début et (à moins que je ne sois au courant), comptent continuer de collaborer avec nous encore longtemps. »

Cette manière de fonctionner porte ses fruits et ça paraît, puisque l’entreprise reçoit quotidiennement (!) des offres d’artistes qui désirent travailler avec elle. Face à cet engouement – qu’Eric s’explique entre autres par le grand succès des deux premiers projets du label Duprince, Rosie Valland et Toast Dawg -, l’équipe d’Ambiances Ambigu[ë]s garde sa mission en tête: « L’objectif n’est pas de tenter de changer les artistes avec qui nous travaillons, mais plutôt de les accompagner dans leur développement. Je crois qu’il est avant tout important de bien choisir les artistes avec lesquels nous travaillons et qu’ils soient bons sur scène. Quand on choisit un artiste de talent, notre travail prend tout son sens. On ne peut pas générer et créer le talent, mais bien juste l’accompagner et trouver les bons outils et les bonnes idées pour qu’il aille toujours plus loin. »

« C’est difficile de sortir des sentiers battus et de l’assumer. »

Le virage numérique, en plus de changer la manière dont les musiciens travaillent, a réduit – d’une certaine façon – les chances de vivre du métier: « Il y a très peu de marché pour tout ce qui sort un peu de l’ordinaire au Québec. C’est triste, mais parfois les projets doivent faire des concessions artistiques pour arriver à survivre. Nous n’avons pas le marché et peut-être un petit manque d’intérêt pour tout ce qui est un peu plus spécialisé. C’est difficile de sortir des sentiers battus et de l’assumer. Je crois encore quand même que ces chemins sont parfois plus longs, mais qu’à long terme ils valent le risque. On vit dans une ère où tout va vite et il est parfois rapidement difficile d’assumer ses choix artistiques et de ne pas se plier au moule. Il faut aussi être conscient qu’il y a peut-être plus d’offre que de demande et que tous les projets ne peuvent s’attendre à bien vivre de ce qu’il font. Mais tsé, c’est la passion au départ qui pousse à faire de l’art, alors l’argent ne devrait pas être un problème… »

Justement, comment un artiste peut-il réussir et aller plus loin dans le contexte actuel? « Le faire pour les raisons qui l’ont poussé à le faire dès le début. De ne jamais s’engager rapidement, les yeux fermés, avec quelqu’un. C’est difficile de trouver des gens avec qui travailler, mais ça doit quand même être les bons. Il faut comprendre dans quoi on s’embarque; bien des artistes/musiciens voudraient bien juste faire de la musique, écrire, faire des concerts, mais la réalité c’est qu’il faut savoir comment développer son projet, comprendre les contrats qu’on signe et analyser les rapports qu’on nous remet à chaque trimestre. Pour le reste, ENJOY! »

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