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Gunpla : histoire de jouet

Gunpla : histoire de jouet

Photo gracieuseté de © SOTSU・SUNRISE

Mon jouet est mieux pensé que le tien. Oui, c’est une logique qui garde la route. Le design industriel ne sert pas uniquement la société et l’environnement. Il nourrit aussi les manies, les collections et les hobbys de l’enfant qui réside encore en chacun de nous. Baron a réussi à s’entretenir avec la division gunpla de Bandai Co., géant japonais du jouet. 

Bienvenue dans l’univers du gunpla, terme obtenu en faisant la contraction des mots « Gundam et plastique ». Gundam, pour ceux qui ne sont pas férus de culture populaire japonaise, c’est un des plus longs mangas de l’histoire nipponne. Créée en 1979 par Yoshiyuki Tomino et Hajime Yatate, la première série télévisée de Mobile Suit Gundam révolutionne les dessins animés de type « mecha » (Goldorak, Transformers, ça vous parle?) et établit le genre « real robot », en raison du réalisme donné à la machine de guerre robotique d’environ 17m de hauteur, pilotée par un être humain, qu’est le Gundam.

Dès 1980, pour surfer sur la vague de popularité lancée par Sunrise et son Gundam, Bandai Co., troisième plus grand fabricant de jouets au monde (qui a aussi mis au monde le Tamagotchi), génère les premiers modèles réduits articulés à assembler, sans colle, à l’image des emblématiques robots. La popularité du manga, qui, après 30 ans, continue de se réinventer dans de nouveaux univers (la dernière mouture, Mobile suit Gundam AGE, date de 2011), est devenue monstrueuse, envahissant les marchés américains et européens dès les années 1990 avec la populaire série Mobile suit Gundam Wing. À l’image de l’anime, le gunpla est devenu un véritable phénomène culturel, offrant un catalogue de plus de 1000 modèles différents, monopolisant 90% du marché des figurines et modèles en plastique au Japon et se répandant dans le monde en tant que passe temps unique.

Mais, derrière ces fragiles modèles de plastique, se trouve une équipe de designers motivés qui, année après année, essaient de réinventer l’art du gunpla. « Le véritable défi, la première priorité d’un designer de gunpla, chez Bandai, explique Yuriko Imafuku, porte-parole chez Bandai Co., c’est de rester fidèle à ‘’l’esprit’’ du Gundam, à ce qu’il représente. En gros, c’est une question de réalisme. » Pour un designer de gunpla, améliorer la qualité du produit, c’est ce poser des questions comme : « Si le Gundam existait réellement, à quoi ressemblerait le design de l’intérieur d’un de ses pieds? Comment est-ce que l’articulation de l’épaule pourrait bouger? »

Il faut dire que les Japonais ne rigolent pas avec le Gundam. Une réplique grandeur nature du tout premier modèle de « mobile suit », le RX-78-2 GUNDAM, a été construite à Tokyo, en 2009, pour célébrer le trentenaire de la franchise. D’ailleurs, bien qu’il n’y ait pas de formation particulière à l’obtention d’un poste de designer de gunpla, les candidats retenus par Bandai portent un uniforme inspiré de ceux des pilotes et membres de la Fédération terrienne des diverses séries de Gundam. Comme quoi, pour designer du gunpla, il faut avoir ça dans le sang.

La technologie au service du design

Toujours dans le but d’atteindre des sommets de réalisme dans la création de ses modèles réduits, Bandai Co. a eu recours à de nombreuses avancées technologiques : l’impression 3D permet la conception rapide et précise de prototypes, une machine peut façonner les moules des pièces à une précision de 40 microns (0,04 mm), une imprimante industrielle peut injecter jusqu’à quatre couleurs différentes dans les plaquettes de pièces, permettant une plus vaste et fidèle palette de couleurs du modèle, des joints d’articulations ronds permettent des mouvements similaires aux articulations humaines et des pièces de plus en plus petites et détaillées rendent possible le mouvement des phalanges des modèles.

Malgré toutes ces innovations, Mme Imafuku rappelle que l’apport humain est irremplaçable dans le processus de développement : « Les designers prennent le soin de sabler les moules des pièces à la main, pour s’assurer d’un résultat optimal. Il y a aussi un apport incroyable des fans, qui représente une immense communauté. Comme le but est de rendre l’expérience du gunpla de plus en plus agréable et simple et que nous voulons aussi développer les modèles réclamés par les amateurs de Gundam, nous prenons vraiment le temps de les consulter avant d’aller de l’avant avec de nouveaux designs de prototypes. » Dans une entrevue donnée au Japan Times en décembre 2012, Junichi Nishizawa, concepteur et designer de gunpla pour Bandai Co., explique que « le processus de développement d’un nouveau modèle, avec toutes les consultations qu’il exige, peut prendre jusqu’à un an, avant que le gunpla ne soit sur le marché. »

Se réinventer sans cesse, chercher à renouveler un produit qui a déjà énormément de succès, voilà un défi que continuent de relever l’équipe de designers de gunpla de chez Bandai Co. Malgré quelques erreurs de parcours, quelques expériences un peu moins concluantes, sur ses 30 années d’existence, le gunpla continue de surprendre et de répondre aux attentes d’une communauté de fans exigeante. Un des derniers modèles à voir le jour en 2013, dans la série Real Grade (échelle 1/144), le Gundam Zeta, contient quelques milliers de pièces (l’armure du torse, à elle seule, en compte 300) qui lui donnent un aspect plus vrai que nature, même si, au fond, ça reste un jouet de plastique.

En bref:

• Plus de 1000 modèles différents à ce jour

• Différents niveaux de difficulté de construction et de réalisme : High Grade (échelle 1/144), Master Grade (échelle 1/100), Perfect Grade (échelle 1/60) et Real Grade (échelle 1/144)

• Les ventes annuelles de gunpla, au Japon seulement, se chiffrent à cinq miliards de yen

Où se procurer du gunpla?

Il est difficile de dénicher du gunpla dans des boutiques montréalaises. Sci-fi Anime, à proximité du métro Atwater, offre une raisonnable sélection de modèles, mais ils s’envolent vite. Sinon, à moins d’aller faire un détour par New-York, la vente en ligne reste le meilleur moyen de s’adonner à ce hobby hors du commun.

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