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FME 2016: comme une impression de colonie de vacances avant l’automne

FME 2016: comme une impression de colonie de vacances avant l’automne

Pour sa 14e année, et notre sixième derrière la cravate, le FME a encore une fois réussi à créer des moments de musique uniques pour ses festivaliers. 

On ne saurait commencer notre compte-rendu sans un hommage au public rouynorandien, puisque sa qualité reste difficile à égaler. D’une écoute exemplaire, d’une générosité dans ses coups de coeur, d’une ouverture à la découverte et dont l’accueil réussit à élargir la définition même du mot, pas étonnant qu’on soit excités chaque fois de franchir les 600 km qui séparent Montréal de Rouyn.

Notre galerie photo du jeudi, avec Québec Redneck Bluegrass Project, Charlotte Cardin, Galaxie et Marie-Pierre Arthur, Groenland, Rouge Pompier, Black Legary, Partner et We Are Wolves

Passons à nos coups de coeur musicaux. Comme on vous le mentionnait, on a adoré La Colonie de vacances, où quatre trios disposés en carré en plein air entouraient la foule massée au centre. Les mélodies oscillant entre rock saturé de décibels, grooves syncopés et post-rock planant fusaient de toutes parts, et regarder la foule en plein déficit d’attention a certainement ajouté à notre plaisir. Pendant plus d’une heure trente, les formations françaises Papier Tigre, Pneu, Electric Electric et Marvin ont permis au public de vivre leurs mélodies en réelle quadriphonie, notamment avec la pièce Les 26 sauces du maître saucier, écrite par Greg Saunier (également batteur de Deerhoof), qui à elle seule totalisait 45 minutes. Guitares, batteries, basses et claviers se complétaient et se répondaient dans une valse musicale unique, jeu de ping pong sonore où la source n’est jamais longtemps où on l’attend. Un moment dont on se souviendra longtemps.

Notre galerie photo du vendredi, avec La Colonie de Vacances, Le Carabine, Foreign Diplomats, Aliocha, Chantal Archambault, Lakes of Canada, Avec pas d’casque et Fred Fortin

Autre bon coup du festival que d’avoir invité Yonatan Gat, guitariste israélien qui se produit à même le sol (ici au sous-sol du Petit Théâtre du Vieux Noranda), au niveau de la foule, et dont l’expérience live se rapproche de l’extase musicale. Gat, accompagné d’un bassiste semblant tout droit tiré d’un film italo-disco et d’un batteur à la virtuosité extrême malgré une batterie très minimaliste, donne à la foule une décharge d’énergie qui fait se sentir heureux d’être en vie.

Le Cabaret de la dernière chance, lieu intime où les spectacles de fin de soirée sont souvent très mémorables, a été généreux en moments de rock fort appréciables. Le jeudi, on a eu la chance de découvrir le duo Partner, originaire de Sackville, dont les rumeurs favorables se sont avérées justes. Le rock énergique et grungy de la formation a contaminé de joie la foule présente. Il faut dire que le charisme de Lucy Niles et de Josée Caron n’était pas étranger à l’enthousiaste accueil que lui a réservé Rouyn-Noranda. Merci pour la découverte. 

Fred Fortin a pris ses aises pour son doublé du vendredi et du samedi. 5 musiciens cordés sur la petite scène du Cab’ en une concentration de talent rarement égalée, Fortin a non seulement joué son très beau Ultramarr mais a revisité, au fil des rappels, les moments forts de l’ensemble de son répertoire. La bonne humeur était palpable et notre vendredi soir s’est très bien conclu ainsi.

C’était notre première rencontre avec la musique live de Laura Sauvage, dont nous avions beaucoup apprécié le premier album Extraordinormal. Nous avons beaucoup apprécié la nonchalance rappelant Moldy Peaches, le côté grunge, les anecdotes pince-sans-rire et la puissance de la voix de Viviane Roy, qui a l’équivalent vocal d’une vieille âme. À ne pas manquer si l’occasion se présente.

Rouge Pompier a embrasé l’Espace lounge Hydro-Québec, la foule étant tout à fait consentante à se laisser emporter. Le chanteur Jessy Fuchs a même invité le public conquis à se laisser aller à un “circle pit” autour d’une installation de la 7e rue d’où il était perché, une occasion que plusieurs n’ont bien entendu pas laissé passer.

Notre galerie photo du samedi, avec Patrick Bernatchez, Keith Kouna, Alex Nevsky, Paupière, Bernardino Femminielli, Ariane Zita, Ponteix, Bernhari, Dan San, Érick D’Orion, METZ, Samba de La Muerte et Yonatan Gat

Groenland était de passage pour présenter en primeur des pièces de son nouvel album A Wider Space, devant une foule fort attentive qui buvait les nouvelles mélodies, et qui lâchait son fou dès qu’elle reconnaissait les airs du précédent The Chase. Pas de doute que les nouvelles pièces, un brin plus électro mais tout aussi fédératrices, recevront un pareil accueil lorsqu’elles seront mieux assimilées.

We Are Wolves, qui lancera son album Wrong à la fin du mois sur étiquette Fantôme Records, a lui aussi présenté des nouvelles pièces à la foule exaltée du Petit Théâtre du Vieux Noranda, dans une prestation théâtrale et énergique dont la meute a le secret.

Mention au doublé de Plants & Animals dimanche, qui non content de clore le festival au Cabaret à minuit, s’est aussi produit directement sur le lac Osisko à l’heure du souper, alors que les spectateurs étaient réunis sur la berge pour apprécier les pièces de la formation montréalaise. P&A était accompagné à la basse par Mishka Stein (qui était sur place depuis jeudi pour la prestation du nouveau groupe Black Legary, à surveiller). Si les chansons de Waltzed in for the rumbling, son dernier album, étaient à l’honneur, c’est avec un plaisir renouvelé et un brin de nostalgie qu’on constate que la formation intègre à nouveau de plus en plus de chansons de son classique Parc Avenue.

Dans les moments plus doux, le lancement d’Effets spéciaux d’Avec pas d’casque, dans le superbe espace de l’Agora des arts se hisse en tête de liste de nos coups de coeur. Le nouvel album a été joué en ordre, dans son intégralité, et a bénéficié d’une écoute religieuse. Le chanteur et parolier Stéphane Lafleur a comparé ce baptême de scène pour le nouveau matériel à « quand t’achètes un chandail neuf pis que t’as hâte de le mettre. » Un kit d’automne qui prendra de plus en plus de relief au fil des écoutes et de l’automne qui prendra du terrain.

C’est la Valdorienne d’origine Chantal Archambault qui brisait la glace de cette chaleureuse soirée, avec les pièces de son mini-album À Hauteur d’homme, monté en formule band pour une unique fois (du moins avant un long moment), spécialement pour le FME. Un moment de musique habité et touchant, à l’image de l’authentique musicienne. Le groupe nous a aussi offert une version non-acoustique de la chanson thème de Saratoga, duo qu’Archambault fait vivre avec son amoureux/bassiste Michel-Olivier Gasse, dont le premier album complet, Fleur, paraîtra le 9 octobre. Une belle brochette de primeurs.

Un moment de rattrapage après moult occasions manquées: Tire le coyote, qui concluait à Rouyn une tournée d’un an et demi. Surnommé par un ami le Neil Young du Québec, la comparaison prend en spectacle tout son sens: non seulement avec l’accueil que lui a réservé l’Agora des arts, entonnant en coeur les chansons puissantes et touchantes de la formation, mais également par le timbre chevrotant de Benoit Pinette. Ce ne sera pas notre dernière rencontre avec la formation, on le sent.

Formation belge qui a gagné le coeur de Rouyn-Noranda lors de ses deux prestations, Dan San est un sextuor qui rappelle parfois Fleet Foxes de par ses harmonies pastorales. Sa pop finement ciselée trouve toutefois sa personnalité propre, mi-éthéré, mi-rock. Lors de son premier concert à l’Agora des arts, le groupe a joint la foule pour une chanson acoustique qui a beaucoup ému les gens présents, lui valant une ovation, et il a remis le tout pour un spectacle d’après-midi au Parc botanique à Fleur d’eau.

Un spectacle surprise marquant a été celui de Keith Kouna (qui se produisait avec les Goules le soir-même) sur la terrasse fort accueillante du Pub Chez Gibb, à Évain en banlieue de Rouyn. Parmi la foule attentive et le bruit du vent dans les feuilles, on s’est rappelé à quel point Keith Kouna est un parolier d’exception. Prenant les demandes spéciales et consultant sa page bandcamp pour se rappeler ses chansons (n’a pas un après-midi facile qui veut), Kouna a livré ses pièces avec sa verve et son débit impressionnant habituels.

Dear Criminals, trio adepte des prises de risque réussies, nous a conviés à une expérience peu commune: un spectacle concocté en collaboration avec le programme Création et nouveaux médias de l’UQAT, où des projections 3D en temps réel, conçues spécialement pour l’occasion, ont accompagné la deuxième moitié du spectacle de la bande. Une imposante foule avait répondu à l’appel et enfilé les lunettes spéciales pour voir défiler tour à tour des nuées d’étoiles, des nappes de boules colorées répondant à des ondulations psychédéliques puis à des silhouettes se déconstruisant en cubes blancs. On espère que la proposition sera reprise éventuellement et amenée plus loin, puisque le mariage entre la musique poignante et dépouillée des doux criminels se prête fort bien à ce type de mariage visuel. 

Notre galerie photo du dimanche, avec Dear Criminals en version 3D, The Vasts, Plants and Animals, Tire le Coyote, Laura Sauvage et The Barr Brothers. 

Ce compte-rendu ne pourrait se conclure sans souligner les apports pertinents à la programmation qu’a fait L’Écart, lieu d’art actuel, qui a présenté une performance intime de Patrick Bernatchez, lui qui tenait l’affiche du Musée d’art contemporain de Montréal d’octobre 2015 à janvier 2016. En lien avec son projet sonore Goldberg Experienced.03 (77k 1er, 2e et 3e mouvements), il a manié les vinyles en simultané sur huit platines, en revisitant les Variations Goldberg de Bach. Il présentait du même coup l’installation Aphélie, qui résulte d’une résidence de création faite à Rouyn-Noranda dans la deuxième moitié du mois d’août. Aphélie, qui se poursuit jusqu’au 2 octobre, est accompagnée par l’exposition Lousse et à propos: Nastassia et les autres de l’artiste montréalaise Élise Provencher, et de l’installation Projet Toutous du duo Marc Martel entrepreneur. 

Dans la cour intérieure du centre d’artiste, une autre performance nous attendait samedi soir: Érick D’Orion, qui à l’aide de vinyles, a superposé les couches sonores pour un résultat décapant et énergisant.

La prochaine édition du FME sera sa 15e, et l’équipe est déjà en branle pour concocter une programmation mémorable. Sans surprise, nous serons de l’aventure pour vous en rapporter les bons moments.

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